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[MEDIAS] Le budget européen et les transports, un débat à 500 milliards – Contexte

Pour le secteur des transports, l’enjeu est de maintenir une enveloppe de subventions efficace et ciblée, malgré le développement des instruments financiers voulus par la Commission.

500 milliards d’euros. C’est ce qu’il faudrait investir entre 2021 et 2030, selon la Commission européenne, pour parachever la colonne vertébrale du réseau européen de transport. Les besoins sont criants comparés au budget investi jusqu’ici et face au défi de la réduction des émissions carbones du secteur, essentielle pour atteindre les objectifs climatiques de l’Union.

Combler les trous et aller vite

Le départ du Royaume-Uni de l’UE va laisser un trou d’une quinzaine de milliards d’euros par an, environ, dans le budget de l’UE. Cette pression ne rend l’élaboration du cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027 encore un peu plus difficile. Les propositions de la Commission sont attendues pour le 2 mai.

Pour maintenir le budget à flot, il faut réduire le trou budgétaire « de 50 % par des coupes dans notre structure budgétaire existante et [de] 50 % avec de l’argent frais provenant des 27 États de l’UE », a déclaré le commissaire européen au Budget, Günther Oettinger, lors d’une conférence le 7 mars.

L’exécutif européen veut boucler la négociation de ce budget avant les élections européennes de mai 2019. Il prévient, dans une note générale publiée le 14 février : un accord après les élections de 2019 retarderait des grands projets d’infrastructures.

Des financements diversement efficaces

Les investissements en direction des transports proviennent de plusieurs programmes européens différents. Certains sont transversaux et leur gestion est décentralisée dans les États. C’est le cas d’Horizon 2020 – appels à projets dédiés à l’innovation et la recherche dans différents secteurs – qui est parti pour être sanctuarisé.

D’autres ne sont pas à l’abri de coupes, comme le Fonds européen pour le développement régional (Feder) ou encore le fonds de cohésion pour les États de l’UE moins développés (63,4 milliards pour la période 2014-2020). En effet, la Commission a reconnu qu’il faudra réduire les dépenses dans la politique régionale.

Le choix des projets dans le cadre de ces programmes est souvent accusé de ne pas être en phase avec les grands objectifs européens en matière de transports (connexion transfrontalière, baisse des émissions carbones…)

« Souvent, il n’y a pas de valeur ajoutée européenne et on n’est pas dans le réseau transeuropéen de transport », critique le député européen Dominique Riquet (Adle), spécialiste des questions budgétaires et des transports.

Le MIE, porte-drapeau de l’efficacité budgétaire

C’est pourquoi tous s’accordent pour défendre en priorité le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), dont la gestion est centralisée par une agence (Inea) rattachée à la Commission. Entre 2014 et 2017, 22,3 milliards d’euros ont été déployés dans ce cadre, mobilisant 46,7 milliards d’euros d’investissement en tout.

Le débat sur les transports dans le budget pluriannuel se critallise donc sur la défense de ce dispositif. Pour cela, commissaire aux Transports, Violeta Bulc, peut s’appuyer sur les faits. Elle a publié un rapport d’étape d’évaluation du MIE, le 13 février. Les coordinateurs des corridors du réseau européen en ont aussi fait le bilan et ont réclamé à leur tour une augmentation des fonds attribués à ce programme. Et au Parlement européen, et au secteur d’enfoncer le clous.

Mais la commissaire a besoin du soutien des capitales pour gagner en poids politique au sein de la Commission, où chacun défend son portefeuille à l’envi.

Du côté des États, le consensus discret

« Il y a un consensus parmi les États pour dire que le MIE est un instrument efficace. Personne ne le conteste« , explique Dominique Riquet (Adle).

« On aimerait bien, notamment, que la France se positionne ouvertement dans ce sens », confie-t-on à la Commission, alors que la Commissaire a évoqué le sujet avec la ministre française des Transports, Élisabeth Borne, en février.

Apparemment, l’heure n’est pas pour la France de demander publiquement des fonds en plus pour les transports, alors qu’elle se prête elle-même à un exercice au niveau national pour réduire les dépenses en direction des infrastructures, ou au moins les reporter.

De manière plus générale, l’heure est plutôt, pour les États, au soutien affiché aux enveloppes budgétaires dédiées aux nouveaux défis que se donnent l’Union, sur la Défense, la question migratoire ou encore la sécurité.

Surfer sur les instruments financiers

Ce qui est sûre, c’est que la Commission, pour dépenser moins et être efficace, veut miser sur les instruments financiers. Autrement dit, des mécanismes (prêts, garanties) qui lui apportent un retour sur investissement, contrairement aux subventions, et attirent plus d’investisseurs privés.

Ainsi, le Fonds européens pour les investissements stratégiques (FEIS), bras armé financier du fameux plan Juncker pour la croissance, va être transformé en un grand mécanisme rassemblant tous les instruments financiers : le « Fond d’investissement unique ».

C’est ce que montre l’annexe d’une lettre de Jean-Claude Juncker du 1er mars. Ce super-fonds comprendra un volet « infrastructures durables ». Le secteur devra prendre un main cet instrument s’il veut sa part du gateau. Alors qu’aujourd’hui, les projets de transports ne représentent que 8% du fonds Juncker.

Publié le 20 mars 2018  pour la revue Contexte par Fanny Roux. Vous pouvez retrouver l’intégralité de l’article sur le site de Contexte en cliquant ici.

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