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[MEDIAS] Les conditions de travail au coeur des débats sur le transport routier en Europe – Les Echos

Les trois dossiers qui fâchent autour de la réforme sur laquelle travaille Bruxelles.

Salaires : le Parlement ferme la porte à la France

Le débat agite l’Union européenne depuis des années : les routiers doivent-ils, comme les travailleurs détachés, être payés au salaire du pays où ils roulent et non plus à celui de leur pays d’origine ? Mi-2015, la France avait imposé le SMIC pour tout le temps passé sur son sol (hors simple transit), via la loi… Macron.

Cela lui avait valu en retour une mise en infraction par Bruxelles, mais aura surtout souligné l’urgence d’enfin clarifier le cadre juridique actuel, flou et contesté. Lundi dernier, le Parlement a adopté une position assez radicale : le simple fait de livrer ou charger dans un pays étranger, une action inhérente à la nature même du métier, ne doit en aucun cas faire du routier un salarié détaché. Il ne basculerait dans ce statut qu’en cas de « cabotage », pratique consistant à effectuer des opérations nationales dans un pays en chemin avant chargement, ou en retour après chargement.

Cabotage : le casse-tête continue

C’est l’autre sujet très sensible pour la France. Aujourd’hui, un maximum de trois opérations sont autorisées, sur un total de sept jours au plus. Le projet dévoilé l’an passé par la Commission réduit ce délai à cinq jours, mais fait sauter tout plafond au nombre possible d’opérations.

Un tour de passe-passe qui risque, sous couvert de simplification, d’affaiblir encore les transporteurs de l’Ouest, prévenait alors l’eurodéputé Dominique Riquet (ADLE, libéraux), car « en France, la distance moyenne d’une livraison tourne autour de 300 kilomètres ; en cinq jours, vous pourrez en faire bien plus que trois ». Le rapport adopté lundi au Parlement bouge encore ses curseurs : il propose d’autoriser sept jours de cabotage, avec un nombre illimité d’opérations mais un maximum de 48 heures par Etat traversé, au seul trajet de retour vers son pays d’origine et avec une période de carence de 72 heures avant de pouvoir revenir sur le territoire d’un Etat membre caboté.

Repos : un assouplissement qui inquiète

C’est une question de bonnes conditions de travail mais aussi de sécurité : un chauffeur a-t-il le droit de prendre son temps de repos dans sa cabine ? Fin décembre, la Cour de justice de l’UE l’a confirmé pour le repos entre deux journées de travail mais l’a interdit pour les repos hebdomadaires, plus longs.

La Commission veut, pour y remédier, que les Etats construisent des logements idoines sur des parkings et aires de repos dédiés. Les Etats de l’Est ouvrent la porte mais veulent le droit de maintenir le repos en cabine tant que ces logements ne sont pas construits, ce qui laisse craindre à la France une manœuvre dilatoire.

Le Parlement a adopté un compromis bancal, autorisant le repos hebdomadaire en cabine quand des « parkings sécurisés », notion floue, sont à disposition. En outre, le Parlement a aussi adopté un assouplissement des modalités de calcul des temps de repos et de conduite qui risque, selon l’eurodéputée écologiste Karima Delli, d’« allonger le temps de conduite avec des conséquences désastreuses pour la sécurité» routière.

Publié le 6 juin 2018 pour la revue Les Echos par Derek Perrotte. Vous pouvez retrouver l’intégralité de l’article sur le site des Echos en cliquant ici.

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