Euro-circonscription Nord-Ouest,  Ils en parlent

[INTERVIEW] Un Brexit réglerait le drame de Calais – Mouvement européen

Interview de Dominique Riquet, député européen, président fondateur de l’intergroupe sur l’investissement de long terme et la réindustrialisation, par le Mouvement européen Nord sur le Brexit. Voici l’analyse de l’ancien maire de Valenciennes.

MEF

Quelles seront selon vous les conséquences économiques et sociales d’un Brexit sur la région Hauts-de-France ?

Elles devraient être faibles et limitées pour les raisons suivantes. Tout d’abord, insularité oblige, nous n’avons que peu de transfrontaliers avec le Royaume-Uni (en comparaison avec la Belgique) et la grande majorité des échanges économiques sont des biens et non des services. Par ailleurs, tout laisse à penser qu’en cas de Brexit, la Grande-Bretagne bénéficierait d’un statut similaire à la Norvège ou la Suisse sans droits de douane ou de barrières au commerce (adhésion à l’Espace Économique Européen). Le rapatriement de l’économie financière à Paris ou Francfort n’affecterait pas notre région bien au contraire puisqu’elle renforcerait notre pays. J’apporterais une nuance sur l’activité touristique, qui risque de subir la baisse du pouvoir d’achat des Anglais en cas de sortie.»

Dans l’hypothèse que le Royaume-Uni reste dans l’Union Européenne, les accords négociés lors du Sommet Européen de février ne sont-ils pas un recul et une limite pour l’intégration européenne et sa volonté d’une « union sans cesse plus étroite entre les peuples européens » ? Pourquoi ?

À n’en pas douter, en l’absence de Brexit, ces accords, fruit d’un chantage scandaleux, constitueront un mauvais signal pour l’intégration européenne. Le précédent britannique pourrait, en effet, donner des idées aux autres États membres. Donc s’il y a un risque « d’effet dominos », c’est bien celui des demandes à la carte désintégratrices plus qu’une multiplication des exit.

Que pensez-vous de la politique de contrôle migratoire et les accords du Touquet, impactant notamment les villes de Calais et Grande-Synthe ? Cette question a-t-elle selon vous un lien avec le référendum anglais ?

Les accords du Touquet ? J’en pense le plus grand mal. Brexit ou pas, le Royaume-Uni ne faisant pas partie de l’espace Schengen, nous aurions dû exiger qu’il garde ses frontières. Dans l’hypothèse d’une sortie de l’UE, les dits accords devraient tomber et le R-U récupérer le contrôle de sa frontière ainsi que répondre de ses obligations internationales en termes de droit d’asile (obligation d’accueil des demandeurs, etc.). Un Brexit réglerait donc les situations dramatiques de Calais et Grande-Synthe.

« L’Union Européenne et ses institutions ne sont pas démocratiques. » Que répondriez-vous à la déclaration de Boris Johnson, actuel maire de Londres et partisan du Brexit ?

Qu’il m’explique ! Lui le citoyen d’un pays monarchique de droit divin dont l’une des chambres parlementaires, la Chambre des Lords, procède de la cooptation à vie et non du suffrage démocratique. Trêve de plaisanterie. Chacune des normes européennes (directives et règlements) procède d’organes démocratiquement élus. Le conseil de l’UE représente les exécutifs nationaux désignés démocratiquement et les membres du Parlement européen sont élus au suffrage universel direct. Il est vrai cela dit que les procédures européennes de décision sont longues et complexes. Cela tient à la diversité des 28 pays membres. Dégager un consensus avec autant de langues, de cultures et d’histoires différentes, ce n’est pas chose aisée. Cela requiert donc du temps. D’ailleurs, le Royaume-Uni use à merveille de tout son pouvoir pour freiner la prise de décision. Mais la lenteur, c’est aussi le prix de la paix. 70 années pacifiques continues sur 2000 ans d’Histoire, c’est une première. Si les procédures européennes sont longues et inadaptées pour réagir à l’actualité brulante, elles ont le mérite de procéder d’un dialogue permanent entre les ennemis d’hier. Vous l’aurez compris, le temps long est le celui de la démocratie. Donc si l’UE est lente c’est qu’elle très démocratique.

Qu’attendez-vous des citoyens européens et notamment de ceux de notre région à moins de 10 semaines du référendum sur le Brexit ? Quel message voulez-vous leur transmettre ?

Puisqu’ils ne sont pas ou peu concernés, je n’en attends pas grand-chose. Un message ? N’ayez pas peur !

Vous pouvez retrouver l’intégralité de l’interview ici.
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