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[LE TROMBINOSCOPE] TRANSPORT AÉRIEN : REDÉCOLLAGE EN COURS ?

Déjà confronté au défi de sa transition écologique, le transport aérien a été durement frappé depuis 2019 par la crise sanitaire. Si les projections pour cet été annoncent une reprise du trafic, les compagnies aériennes, traditionnellement habituées à une croissance régulière de la demande, ont accusé le coup. La contraction des ressources humaines qui a fait suite à l’arrêt quasi total du transport aérien est aujourd’hui une difficulté supplémentaire en situation de reprise. Les scènes de chaos dans les aéroports d’Amsterdam-Schiphol et de Dublin sont évocatrices du climat de désorganisation qui règne là où le faible niveau de protection sociale a entraîné des départs massifs de salariés au cours des deux dernières années. Les modèles de protection plus exigeants de structures françaises telles qu’Aéroports de Paris ou Air France font aujourd’hui la démonstration de leur pertinence, et permettent d’aborder la saison estivale avec davantage de sérénité.

C’est dans ce contexte difficile que la filière doit opérer sa transition vers une aviation plus respectueuse de l’environnement. L’Union européenne est le cadre adapté pour définir les règles qui amèneront à la décarbonation du transport aérien qui est prévue par le Green Deal. Trois textes concernent particulièrement le transport aérien : la directive taxation de l’énergie, le règlement sur les carburants durables d’aviation et la réforme du marché de carbone. Le 8 juin, les députés européens ont acté la disparition anticipée des quotas gratuits et l’inclusion des vols internationaux au départ de l’Union dans le marché de carbone. Jusqu’ici, les compagnies ne devaient payer le prix du carbone que pour les vols intra-communautaires, notamment compte tenu des réticences de nos partenaires internationaux à appliquer le droit européen hors du territoire.

Assurément, le catalyseur le plus puissant de la transition sera technologique. Le secteur aéronautique, qui est l’un des fleurons industriels européens, a pris le sujet à bras le corps et mène une politique active en matière de recherche et de développement sur l’efficience des moteurs et l’avion à hydrogène. Le chemin est encore long : les prévisions les plus optimistes évoquent l’arrivée sur le marché d’aéronefs à hydrogène en 2035, et ils n’auront ni l’autonomie suffisante pour réaliser des vols long courrier, ni la capacité des appareils de ligne actuels. Pour l’instant, les carburants durables d’aviation constituent une première étape pour atténuer le bilan carbone des vols. En 2022, un Airbus A380 a pu voler pour la première fois au kérosène conventionnel pendant trois heures. Cette solution restera toutefois limitée compte tenu de la forte concurrence dans l’accès aux carburants durables qui souffrent de l’insuffisance des matières premières. Les leviers d’actions pour la décarbonation du secteur aérien existent. Qu’ils soient de nature réglementaire ou technologique, ils partagent une caractéristique commune : un impact fort sur les coûts d’exploitation et donc sur les prix des billets d’avion. Alors que les trente dernières années ont été celles de la démocratisation du transport aérien, cela pose inévitablement la question de son accessibilité pour le plus grand nombre. Les gilets jaunes ont quitté les ronds-points : ne traçons pas leur route vers les aéroports en n’intégrant pas cette question dans le débat public.

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