Ils en parlent

[INTERVIEW] Je ne crois pas à l’effet domino d’un Brexit – RTS

Brexit or Brexin ? Vous faites volontiers vôtres les réflexions de l’ancien premier ministre socialiste Michel Rocard pour qui l’Europe ne pourra être relancée sans que les Anglais en sortent :

C’est un propos censé dans la mesure où moi j’aime bien les Anglais, mais pas compte-tenu de leur situation en Europe. Ils sont en Europe faiblement, ils ont « opt-outé » sur tout à peu près : ils ne sont pas dans Schengen, ils ne sont pas dans la zone euro, ils ont des « opt-outs » juridiques sur beaucoup de choses. Ils ont un petit pied dans l’Europe et veulent avoir un grand pied dans le marché unique, ce qui est très bien d’ailleurs. Mais je pense que le projet politique de l’Europe est d’une autre nature. En réalité, dans l’Europe, les Anglais ont constamment mis leur énergie, qui est très grande d’ailleurs, à freiner le processus d’intégration européenne, dont ils ne veulent pas.

Un Brexit pourrait-il engendrer un effet domino en Europe ?

Je ne partage pas du tout ce sentiment d’urgence car, je le répète, la situation des Britanniques est très particulière au sein de l’Europe. Donc c’est un domino qui n’est pas sur la table : s’il tombe, il tombe tout seul. Et deuxièmement, je pense que le problème n’est pas d’avoir une Europe la plus large, mais d’avoir une Europe la plus cohérente possible. Si elle était plus cohérente, elle serait probablement plus stable et plus attractive. Cette relative incohérence actuelle tient peut- être à des élargissements qui ont été trop rapides et puis aussi à des statuts particuliers qui affaiblissent l’Europe. Il faut revenir aux fondamentaux.

Quelle conséquence militaire du Brexit en Europe ?

En ce qui concerne le problème militaire, je dois malheureusement constater qu’il n’y a pas de politique militaire intégrée du tout, qu’il n’y a même pas de politique de défense ni d’affaires étrangères européennes, et que dans ces conditions, on ne démonterait rien puisque rien n’existe à ce niveau. Je pense qu’au contraire si on arrivait à intégrer un noyau dur communautaire, on arriverait probablement à des politiques de défense qui seraient de meilleure qualité, moins coûteuses pour les contribuables et plus efficaces pour leur défense.

Cameron est-il dépassé par son propre référendum ?

Cameron a été pris à son propre piège. Il était dans une position où il pensait que cette idée de référendum sur l’Europe pouvait conforter sa position et sa réélection, puis il s’est aperçu qu’au sein de son propre parti, il y avait des gens qui avaient une position différente et il se retrouve maintenant avec quelque chose qui lui brûle les mains. Je crois que le premier qui ne désire pas le Brexit, c’est lui : ça pourrait lui coûter sa place dans l’Histoire, et sa place actuelle de premier ministre. Il a allumé une mèche, et il n’a pas très bien vu qu’effectivement elle était reliée au baril de poudre ».

Réécoutez en intégralité mon interview par Romain Clivaz pour la RTS ci-après :

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