Industry, research and energy (ITRE),  L'industrie, la recherche et l'énergie (ITRE)

Evitons le « syndrome Tour Eiffel » pour Galileo !

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Je suis intervenu ce mardi 27 janvier à la conférence annuelle de la politique spatiale organisée par Business Bridge Europe à la Commission européenne.

Voici mon intervention (seul le prononcé fait foi) :

 

Mesdames et Messieurs,

C’est un grand plaisir d’être une nouvelle fois parmi vous et je voudrais remercier Marc Paoloni et Business Europe pour leur invitation.

Je crois que la question posée dans le titre de cette session est tout à fait juste.

Il semble que nous nous trouvions aujourd’hui dans une situation assez absurde.

Je ne reviendrai pas sur le nouveau retard pris par le projet Galileo du fait des difficultés qu’a connu le lancement en août dernier et qui font que les premiers services commerciaux ne seront pas disponibles à la fin de cette année mais plutôt début 2016.

Non, ce que je constate c’est que la constellation des satellites de Galileo est sur le point d’être complète et qu’il règne encore un grand flou sur la façon dont ils seront exploités.

J’ai envie d’appeler cela « le syndrome Tour Eiffel » : une merveille de technologie dont les retombées économiques ne sont pas envisagées (ce qui dans le cas de notre Tour a failli conduire à sa destruction avant que l’on se rende compte de son utilité pour la radio).

Le potentiel dérivant des nombreuses données qui seront à notre disposition grâce à Galileo est pourtant énorme, en particulier dans le domaine du transport :

Avec la mise en place d’EGNOS, qui permet d’améliorer le positionnement du GPS, nous accomplissons déjà beaucoup de choses. Dans le transport maritime par exemple, ce système permet d’orienter les navires à travers des canaux étroits ou de faciliter l’exploitation des ressources halieutiques au large de nos côtes. Dans le secteur de l’aviation, EGNOS fournit une assistance pour le sauvetage en montagne ou encore l’atterrissage d’avions volumineux dans des aéroports de taille moyenne.

Mais Galileo et son signal encore plus précis devrait nous fournir encore plus d’opportunités : favoriser le développement du transport multimodal, guider les tracteurs pour augmenter le rendement des récoltes ou même développer des services d’aide aux personnes âgées ou handicapées (par exemple, les personnes atteintes d’Alzheimer qui se seraient perdues).

Qui proposera tous ces services?

La Commission européenne est la propriétaire de ces satellites. Elle doit donc développer une stratégie pour développer une communauté d’utilisateurs de ces données.

Il y a urgence à avoir cette réflexion pour trois raisons :

1) Le chiffre d’affaires généré par le GPS américain est estimé à 150 milliards de dollars par an et, d’après la Commission, plusieurs milliers d’emplois découleraient de la seule mise en service de Galileo. Il y a donc ici un réel levier de croissance mais pour cela, des actions de promotion doivent être entreprises dès maintenant. Le slogan d’EGNOS est assez intéressant : « It’s there. Use it. » Or les choses sont parfois plus compliquées. Face à une méconnaissance des possibilités offertes ou face à une demande fragmentée, nous devons prendre les choses en main et démarcher les utilisateurs potentiels.

2) Il s’agit de l’argent public. Le Parlement européen s’attachera donc à ce que ce projet vive, ne serait-ce que parce que les contribuables que comptent nos électeurs peuvent se demander à quoi finalement servent tous ces appareils coûteux au-dessus de leur tête.

3) C’est surtout une question stratégique devenue pressante. En dépendant excessivement du GPS américain, nous ne maîtrisons pas les satellites sur lesquels se base notre politique étrangère et de sécurité. Comme dans les domaines de l’énergie et du numérique, l’accès de l’Europe à l’espace ne doit pas être fonction du bon vouloir de pays tiers! L’espace est indissociable de notre souveraineté, ne le laissons pas aux autres. Cessons de subir les 3 « G » : GPS, Gazprom et Google.

Je serais donc très intéressé d’avoir la position de la Commission à ce sujet mais aussi des industriels mettant en œuvre le projet Galileo.

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